La passion des Copocléphiles : une collection qui ouvre les portes du temps et de la mémoire
Dans notre quotidien où les objets simples se transforment en véritables trésors, la copocléphilie s’impose comme une passion discrète mais passionnée. Ce mot, forgé dans les années 1960 par M. Papillon, un patron de bar parisien qui en fit un sanctuaire pour les collectionneurs, désigne l’art de rassembler des porte-clés. Tiré d’une étymologie inventive mêlant le grec « kope » (tenir), « kleis » (clé) et « phile » (aimer), il symbolise un loisir accessible à tous, des plus jeunes enfants aux adultes empreints de nostalgie.
Les racines de la copocléphilie plongent au XIXe siècle, époque où le porte-clés ne servait qu’à assembler des clés sur un simple anneau métallique. Mais c’est en 1902, lors du Salon du Cycle à Bruxelles, que voit le jour le premier porte-clés publicitaire, conçu par la marque Gladiateur. Le véritable essor survient dans les années 1950 : les grandes marques, qu’il s’agisse d’agroalimentaire ou d’automobile, l’adoptent comme outil promotionnel incontournable. En France, son âge d’or se situe dans les années 1960, avec plus de 65 000 modèles différents édités et reproduits à des dizaines de milliers d’exemplaires chacun. À cette époque, près de deux millions d’amateurs – les copocléphiles – se passionnent pour ces petites pièces, transformant garages et boutiques en mines d’or de nouveautés. En 1966, les Actualités Françaises décrivent déjà cette « manie » comme un phénomène social, rassemblant 1,5 million d’adeptes qui vantent les mérites d’un beau porte-clés.
Qu’est-ce qui explique un tel engouement ? Les porte-clés dépassent leur simple fonction utilitaire : ils incarnent des souvenirs de voyages, illustrant monuments ou figures célèbres, tout en étant légers et pratiques à emporter. Pour les adolescents, ils deviennent de véritables accessoires de mode, suspendus aux sacs ou fermetures éclair, à l’effigie de groupes de musique, de dessins animés ou même de peluches oversize. Les collectionneurs chevronnés traquent les modèles promotionnels anciens, tels ceux de la marque Bourbon, qui s’arrachent parfois à plus de 100 euros pièce sur le marché des antiquités. Avec leurs fonctionnalités multiples – ciseaux intégrés, mini-jeux, créations artisanales en perles et cordons – ils offrent une variété inépuisable. Cette richesse séduit tous les âges, alliant esthétique et potentiel de revente.
Aujourd’hui, même si les grandes enseignes ont délaissé le porte-clés publicitaire au profit d’objets numériques, des dizaines de milliers d’aficionados restent fidèles. Le record mondial, détenu par l’Espagnol Angel Alvarez Cornejo avec 62 257 pièces validées par le Guinness World Records en 2016, témoigne de l’ampleur de cette passion. Commencée à l’âge de 7 ans, sa collection occupe un garage et un entrepôt loué, reflet d’une vie entièrement dédiée à ces minuscules témoignages.
Pour débuter, les spécialistes recommandent de choisir un thème – voyages, pays, marques – et de commencer modestement, avec une dizaine de pièces. Fixez un budget, car les tarifs s’échelonnent de quelques euros à plusieurs centaines pour les raretés. Exposez-les sur un miroir ou dans une boîte dédiée, en y associant vos souvenirs personnels. Brocantes, boutiques de jouets et sites internet regorgent de pépites ; prenez soin de les préserver des enfants et des animaux.
La copocléphilie n’est pas qu’une simple accumulation : c’est une invitation à la mémoire collective, un loisir chaleureux qui sublime l’ordinaire en une petite merveille. À l’ère du numérique, ces objets palpables rappellent que la véritable richesse se cache souvent dans les détails les plus précieux.







